Archives départementales des Ardennes

Des avantages d’être bourgeois

Charte communale accordée par Hugues III, comte de Rethel, à Mézières, 1233

Le document du mois vient compléter ceux présentés dans l’exposition « Comtes de Rethel – Ducs de Mazarin – Princes de Monaco. Une histoire ardennaise » visible du 07 mars au 08 juin 2025 dans les salles d’exposition temporaire du Musée de l’Ardenne à Charleville-Mézières.

Il s’agit du plus ancien document qui consacre les libertés communales de Mézières et le plus ancien document original conservé dans le fond communal des archives de Mézières. Cette charte est accordée aux bourgeois par Hugues III, comte de Rethel, au mois d’août 1233. Rédigée en latin, il a existé une version écrite en français aux Archives départementales (AA10), aujourd’hui détruite mais dont nous avons encore trace notamment grâce au travail de l’archiviste Paul Laurent. Cette charte règle les droits du comte de Rethel et ses rapports avec les bourgeois. Elle consacre les anciens privilèges des bourgeois et leur en accorde des nouveaux. Elle renferme aussi un tarif d’amendes pour les crimes et délits contre les personnes. Elle fut confirmée par les comtes et comtesses de Rethel Manassès (mai 1256), Philippe duc de Bourgogne (22 février 11386-87), Marguerite duchesse de Bourgogne (21 juin 1404), Charles (20 janvier 1437-38), et Jean (20 mars 1464-65) comtes de Rethel.

Voici un panel des avantages concédés par cette charte aux bourgeois de Mézières :

· Le principal privilège accordé aux bourgeois est celui de choisir leurs représentants municipaux nommés échevins.

· Le comte est libre de choisir son prévôt parmi les bourgeois.

· Les différents qui s’élèvent entre le comte et les bourgeois sont portés devant les échevins, au jugement desquels le comte est obligé de se soumettre.

· Les bourgeois de Mézières ont le droit d’arrêter eux-mêmes un débiteur étranger. Seuls les échevins peuvent ordonner une arrestation de bourgeois pour dettes.

· Si un bourgeois a été saisi injustement de ses biens par requête du comte, celui-ci doit lui restituer immédiatement. Chaque bourgeois peut acquérir et vendre ses biens à son gré.

· Les bourgeois peuvent se marier où bon leur semble. Il leur est cependant interdit de prendre une femme originaire des contrées soumises à l’autorité des vassaux du comte de Rethel.

· Hugues III affranchi les bourgeois de la redevance prélevée sur chaque coupe de bois « droit de bûche et d’obole du bois ». Il leur confirme le droit de pêcher dans la Meuse, à Mézières et même au-delà.

· Il leur est permis de quitter la ville pour aller habiter ailleurs, ils doivent alors payer le droit de vinage et un droit d’issue de deux sous.

En retour des privilèges que leur concède cette charte communale, les bourgeois de Mézières sont astreints à certaines obligations envers le comte de Rethel, par exemple :

· Ils doivent s’acquitter de plusieurs droits : droit de bourgeoisie, aides aux quatre cas ; Ils doivent aussi au comte de Rethel, l’ost et la chevauchée (aide militaire qui consiste à rejoindre l’armée du seigneur en période de guerre).

· Les bourgeois sont sujets à la banalité des moulins du comte de Rethel, situés à l’est de la ville.

· Le bourgeois qui a négligé d’accomplir le service de l’ost peut se purger par son seul serment en disant qu’il n’a pas connu la semonce. De même, si on l’accuse de se soustraire à la banalité des moulins, il est reconnu innocent s’il affirme que son blé a été porté au moulin.

· Le comte peut leur faire payer la moitié des dépenses occasionnées par la fortification du bourg de Mézières dans la limite de cent livres annuelles.

· Lors d’un différend entre bourgeois, les témoins doivent être choisis parmi les bourgeois de la ville.

· Les amendes infligées pour coups et blessures vont de 15 sous à 50 livres, selon le type d’armes et le lieu (château, bourg) et le type de blessure, et perçues au profit du comte de Rethel.

· Les injures adressées à un bourgeois font l’objet d’un tarif spécial de 2 à 5 sous. La punition la plus forte concerne les cas d’homicide et, lorsqu’un bourgeois épouse une femme des vassaux du comte sans l’autorisation de ce dernier.

Au commencement du XVesiècle, les clercs et les nobles de Mézières, jaloux des privilèges des bourgeois, demandèrent à entrer dans la bourgeoisie. Cette autorisation leur fut donnée par Philippe de Bourgogne en décembre 1412.

Le sceau et son contre-sceau ici présents sont des moulages en plâtre.

· Le plus petit, le contre-sceau, représente les armoiries de Rethel composées de trois râteaux. Y devait être écrit : SECRETVM MEVM MICHI

· Le sceau représente quant à lui le seigneur assis sur son cheval galopant. La tête du personnage est protégée par un heaume cylindrique à timbre plat, vêtu d’un haubert recouvert d’une cotte d’armes. Il brandit de la main droite une épée et de la gauche un bouclier triangulaire, présenté de face, chargé de deux râteaux (Rethel). Le cheval est recouvert d’une housse échancrée portant un vairé (fourrure de petit-gris). L’épée et les jambes du cheval mordent sur l’exergue. Y devait écrit : S HVGONIS COMITIS REGITESTENSIS

Partager sur