Une nouvelle voie de navigation
Projet d’un canal des Ardennes au XVIIIe siècle
La construction du canal des Ardennes date du XIXe siècle cependant, les premiers projets ont été envisagés deux siècles plus tôt. Les Archives départementales ont acquis en ventes publiques en 2024 un mémoire en forme de devis qui date de 1753 (cote 1J1583). Ce projet s’étendait déjà de la rivière de Bar jusqu’à celle d’Aisne, depuis Semuy jusqu’à Rethel.
Il est alors prévu d’élargir le lit du ruisselet des Nonnes afin d’empêcher les inondations car celui-ci est régulièrement chargé d’herbe et d’ordures. Il est aussi prévu de créer des écluses jusqu’à Brieulles. Le mémoire prévoit l’acquisition de terrain pour le lit du canal (240 000 livres tournois) et la construction de 18 écluses (340 000 livres tournois). Pour la rivière d’Aisne, le budget s’élève à 720 000 livres tournois incluant le changement de lit et les écluses. La longueur du canal depuis la rivière de Bar jusqu’au Fond des Pretres est décrit comme faisant 2827 toises.
Dans un second feuillet, une convention est passée entre Louis, comte de Mailly, et Henry Fédière, ayant pouvoir des héritiers de feu Bernard Provillard, sieur Dunaime, qui a obtenu le privilège de construction du canal de jonction de la rivière de Meuse à la rivière de Seine par la communication de la rivière de la Bar à la rivière d'Aisne.
Plusieurs études et projets ont lieu avant notre document. Dès 1603 l’idée de redresser et curer le cours d’eau de la Bar et le rendre navigable est inscrite dans un arrêt du Conseil d’Etat du 31 juillet qui lève 9 000 livres pour le projet. On en retrouve d’autres durant tout le siècle (notamment en 1634 et en 1664) mais il s’agit de projets isolés. La navigation sur les trois rivières concernées occupe les esprits car les bénéfices en seraient importants pour le commerce des grains, du fer (particulièrement pour les besoins en munitions), du charbon de terre, du marbre, de l’ardoise et du bois (pour la construction navale et le chauffage).
Plusieurs autres études ont lieu au XVIIIe siècle. Vers la même période que notre document, il semble que l’étude de l’ingénieur Cretté est bien plus avancée mais la gestion économique du projet cause sa perte. Le privilège de faire construire le canal revient ensuite au prince de Conti. Le canal devait même se nommer « Canal Royal de Champagne ». Malgré ses atouts, le projet buta sur les difficultés financières et techniques et ne fut réalisé que sous la Restauration, entre 1827 et 1829.